Augmentation des prix en raison de la guerre en Ukraine – révision de contrats privés et publics
En raison de la guerre en Ukraine, de nombreuses entreprises sont confrontées à de très fortes augmentations de prix qu’elles ne peuvent pas simplement répercuter sur leurs clients dans le cadre de contrats en cours d’exécution.
Dans ce cas, il est important d’avertir le client le plus tôt possible afin de trouver une solution pour les augmentations de prix imprévisibles.
Cette question concerne aussi bien les contrats (de marchés) publics que les contrats privés.
Contrats privés
À cet égard, la loi B2B stipule que les clauses qui ont pour objet d’autoriser l’entreprise à modifier unilatéralement sans raison valable le prix sont présumées abusives.
En outre, en ce qui concerne les contrats privés, l’article 57 de la loi relative aux mesures de redressement économique est pertinent.
Tout d’abord, cet article stipule que la révision n’est autorisée qu’à concurrence d’un montant maximum de 80 % du prix final. Par conséquent, le facteur fixe dans une formule de révision des prix doit être d’au moins 20%.
En second lieu, cet article prévoit que les contrats ne peuvent contenir des clauses de révision de prix que si elles se réfèrent à des paramètres qui représentent les coûts réels. Si la clause de révision des prix prévue dans le contrat ne reflète pas l’augmentation actuelle des prix, il nous semble possible de demander une modification de la clause de révision des prix prévue (non adaptée) sur base de l’article susmentionné.
Si le contrat ne prévoit pas de clause de révision des prix, mais que l’inclusion d’une telle clause est néanmoins souhaitable pour assurer l’équilibre économique du contrat, il nous semble qu’il pourrait éventuellement être demandé, sur base de la bonne foi et de la théorie de l’imprévision, de renégocier le contrat, y compris l’ajout d’une clause de révision des prix. À cet égard, il est fait référence au futur article 5.74 du nouveau Code civil concernant l’imprévision (prévoyant une codification de la jurisprudence récente de la Cour de Cassation).
Contrats publics
L’article 38/7 de l’arrêté royal établissant les règles générales d’exécution des marchés publics (AR EXECUTION) rend obligatoire l’inclusion d’une clause de révision des prix pour les marchés de travaux et de services visés à l’annexe 1 de cet AR EXECUTION, à l’exception des marchés dont la valeur estimée est inférieure à 120.000 EUR et dont le délai d’exécution initial est inférieur à 120 jours ouvrables ou 180 jours calendrier. Pour ces derniers contrats, il ne s’agit pas d’une obligation mais bien d’une possibilité.
Pour les marchés de fournitures et de services qui ne figurent pas à l’annexe 1 de l’AR EXECUTION, l’ajout d’une clause de révision des prix n’est pas une obligation, mais seulement une possibilité.
Conformément à l’article 10 de la Loi sur les marchés publics, l’article 57 précité de la loi relative aux mesures de redressement économique ne s’applique pas aux marchés publics. Pour les marchés publics, il n’est donc pas nécessaire de prévoir un facteur fixe de 20% et une formule de révision des prix couvrant 100% du prix peut être prévue.
Si une clause de révision des prix est déjà prévue dans le contrat et si elle couvre de manière adéquate les augmentations de prix actuelles, il va de soi que la clause de révision des prix existante peut être appliquée.
Si la clause de révision des prix prévue ne permet pas d’absorber suffisamment les hausses de prix actuelles, il nous semble que l’on pourrait demander de renégocier la clause de révision des prix sur base de l’article 38/11 AR EXECUTION. Le fait que le pouvoir adjudicateur a prévu une formule de révision de prix inadaptée dans le cahier des charges constitue alors une négligence. En outre, l’article 38/7 AR EXECUTION stipule que la révision des prix doit refléter la structure réelle des coûts. Eventuellement, l’article 38/9 AR EXECUTION pourrait également être invoqué pour demander la renégociation d’une formule de révision des prix inadaptée. Le préjudice subi serait alors la différence entre le prix calculé selon la formule inadaptée et celui calculé selon une formule « correcte ».
Même si aucune formule de révision de prix n’est prévue, il nous semble que l’article 38/9 AR EXECUTION pourrait être invoqué pour inclure une formule de révision des prix dans le contrat.
En ce qui concerne ce dernier article, le contractant ne peut invoquer l’imprévisibilité pour demander une révision du contrat que s’il peut prouver que la révision est devenue nécessaire en raison de circonstances qui ne pouvaient raisonnablement être prévues lors du dépôt de son offre, qui ne pouvaient être évitées et dont les conséquences n’ont pas pu être corrigées malgré tous les efforts déployés à cet effet.
Dans le contexte actuel de fortes augmentations de prix dues à la situation de guerre en Ukraine, ces conditions doivent donc être spécifiquement remplies et aucun droit automatique à une révision du contrat ne peut en découler. Il sera donc nécessaire d’indiquer et de prouver, au cas par cas, que ces conditions sont remplies. Bien que le caractère imprévisible de la guerre et des hausses de prix qui en résultent semble a priori pouvoir être défendu, il conviendra également d’examiner dans quelle mesure les conséquences de cette guerre dans un secteur spécifique pour un contrat spécifique auraient pu être évitées et, en outre, si tout le nécessaire a été fait pour y remédier.
Les révisions peuvent consister en une prolongation du délai, une compensation en raison d’un préjudice très important ou l’annulation du contrat.
Pour pouvoir prétendre à une indemnisation, le préjudice doit atteindre l’un des seuils prévus à l’article 38/9 AR EXECUTION.
Tant dans le cadre de l’article 38/11 que de l’article 38/9 AR EXECUTION, les conditions d’introduction prévues par les articles 38/14 à 38/16 AR EXECUTION doivent être respectées.
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